André
Gide
(Paris 1869 - id. 1951)
Issu,
par son père, d'une famille protestante
du Languedoc, par sa mère, de la bourgeoisie
catholique normande, André Gide attribua
à cette double ascendance la double postulation
sensible dans son oeuvre.
Tôt
orphelin de père et élevé,
selon une morale rigide, par une mère autoritaire,
il épousa en 1895 sa cousine Madeleine
à laquelle l'unissaient des sentiments
sur lesquels il s'était déjà
exprimé dans Les Cahiers d'André
Walter (1891), recueil de proses poétiques.
A la même veine symboliste appartiennent
Le Traité de Narcisse (1891) et
La Tentative amoureuse ou le Traité
du vain désir (1893).
Parti
en convalescence en Algérie (1893), Gide
y traversa une crise spirituelle déterminante
; prônant désormais la légitimité
d'un bonheur humaniste ("rien que la terre")
et le refus des acquisitions de l'éducation
ou des impératifs de la morale, l'écrivain
exalta la "ferveur" et l'ivresse d'une
disponibilité sensuelle dans Les Nourritures
terrestres (1895).
Déjà
nuancé dans le conte philosophique Prométhée
mal enchaîné (1899) et dans le
drame Saül (1903), cet idéal
individualiste fut nettement tempéré
dans L'Immoraliste (1902).
En
1909, parut (dans La Nouvelle Revue française,
qu'il venait de fonder avec Copeau et J. Schlumberger)
La Porte étroite où, manifestant
une impartialité austère, Gide respectait
"l'évasion vers le sublime" de
son héroïne Alissa.
Tendu
vers la recherche d'un équilibre intérieur
qui tînt compte également de la sensualité
et de l'intelligence, de l'égoïsme
et de l'altruisme, l'écrivain composa successivement
Les Caves du Vatican (1914) et La Symphonie
pastorale (1919), drame moral et conjugal
d'un pasteur protestant (d'où l'équivoque
du titre), où le classicisme de l'expression
sert la ferveur sincère du ton.
En
1925, un roman complexe, à la fois lyrique
et critique, Les Faux-Monnayeurs, reprenait
le problème de la création littéraire,
abordé dans la jeunesse de l'écrivain
avec Paludes (1895).
Orienté
vers un idéal humanitaire, après
un voyage en Afrique noire, il dénonça
les excès du colonialisme (Voyage au
Congo, 1927 ; Retour du Tchad, 1928)
et se rapprocha du parti communiste, nuançant
cependant sa position dans Retour de l'URSS
(1936) avant de s'opposer nettement aux communistes.
En
1946, Thésée allait apporter la
conclusion de la pensée morale de l'auteur
en exaltant toute forme d'action qui rend aux
hommes leur liberté intérieure.
Parallèlement,
dans son Journal tenu depuis 1889 (publ.1943-1953),
l'écrivain rendait compte avec une sincérité
lucide et une constante exigence littéraire
de la complexité de sa vie morale, sentimentale
et intellectuelle, complétant ainsi un
roman autobiographique, Si le grain ne meurt
(1920 et 1924), un essai ancien, Corydon
(1911 ; 1920 ; signé 1924), où il
avait fait une courageuse et minutieuse apologie
de l'homosexualité masculine, et ses Correspondances,
riches et élaborées (avec F. James,
1948 ; P. Claudel, 1949 ; Rilke, posth. 1952 et
Valéry, 1955).
Prix
Nobel de littérature 1947
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